Après le magnifique live acoustique d'Einar Solberg', c'est encore un grand de la musique progressive qui sort un nouvel album solo, j'ai nommé 'Steve Hackett' dont le dernier enregistrement studio, 'Surrender of Silence' date de 2021. Ces dernières années, le Britannique a été bien occupé avec ses différentes tournées de reprises de 'Genesis' avec 'Genesis Revisited Band and Orchestra – Live' en 2019 qui a été suivi de 'Selling England By The Pound & Spectral Mornings' en 2020, lui-même suivi de 'Genesis Revisited Live: Seconds Out & More' en 2022 et le dernier de la liste a été la reprise de 'Foxtrot' avec 'Foxtrot At Fifty + Hackett Highlights: Live in Brighton' en 2023. Mais on sait que Steve est toujours prolifique en nous offrant également de magnifiques albums et 'The Circus and the Nightwhale' est donc son dernier bébé qui ne doit pas être loin d'être le 30ème du Britannique ! Pas de surprise, au-delà de ce rock progressif qu'il perpétue depuis plus de 50 ans maintenant, on retrouve cet alchimiste de la musique du monde, influencé par de nombreux styles et qui cette fois nous emmène, je cite Steve dans " un album concept de rite de passage qui dit les choses que je voulais dire depuis très longtemps " : je vous laisse donc imaginer ce que représente cette pochette sur laquelle une baleine engloutit un cirque. Dans tous les cas, cet album est dédié à sa femme 'Jo' et raconte l'histoire de 'Travla' qui est certainement un mélange entre réalité et fiction, de la vie de Steve.
Musicalement, et comme on en est désormais habitué, nous naviguons dans des paysages très différents les uns des autres ce qui donne encore une fois à cet album, une diversité absolument fantastique mais, revers de la médaille, il faut être ouvert à toutes sortes de genres musicaux assez éloignés les uns des autres ce qui pour ma part, m'apporte généralement le plus de plaisir. Au menu de 'The Circus and the Nightwhale', point de longs développement mais 13 compositions assez courtes chacune et, pour toutes celles et tous ceux qui sont familiers avec les albums de 'Steve Hackett', nous retrouvons les artistes bien connus qui gravitent autour du 'Britannique' (voir liste ci-dessous).
Les trois premières compositions ne présentent aucun blanc entre chaque et n'en forment qu'une seule : 'People Of The Smoke' ouvre l'album en nous emmenant dans un train à vapeur et, après une introduction symphonique, c'est dans une ambiance rock entraînante avec de magnifiques harmonies vocales que le titre se poursuit sur le tempo de la locomotive, puis, le court 'These Passing Clouds' change de registre pour un instrumental romantique sur lequel la guitare de 'Steve Hackett' fait des merveilles sur une mélodie mélancolique. En alternance, plus énergique, 'Taking You Down' nous embarque dans du rock musclé et bien rythmé avec des arrangements vocaux remplis de réverbération et avec deux magnifiques solos, tout d'abord, de saxophone de 'Rob Townsend' et ensuite, de guitare de 'Steve Hackett'.
Sans transition, nous revenons dans des eaux calmes avec 'Found and Lost' dont l'introduction met encore en avant Steve avec, cette fois, sa guitare acoustique (rappelons-nous le très bel album acoustique 'Under A Mediterranean Sky' datant de 2021) et qui est suivi d'une section baignant dans une ambiance langoureuse de cabaret, puis, 'Enter The Ring' nous ramène au progressif de 'Genesis' dans les années 70 avec de très belles harmonies vocales, le fidèle ami de Steve, 'Nad Sylvan', amenant toujours cette douceur dans le chant) et la flûte de son frère 'John Hackett' ajoutant un côté bucolique en milieu de titre avant que Steve nous offre un nouveau solo de guitare remarquable, le titre se terminant dans une atmosphère d'orgue de barbarie, tout cela en moins de 4 minutes !! Avec 'Get Me Out', nous sommes emmenés dans une magnifique composition avec une très belle mélodie ponctuée par des interventions guitaristiques remarquables avec une partie centrale complètement débridée, puis, 'Ghost Moon and Living Love' est le titre le plus long de l'album qui, après une introduction rappelant un chant d'Eglise dans laquelle 'Amanda Lehmann' nous offre de magnifique volutes célestes, déroule une mélodie prenante sur un mid-tempo léger et poétique.
Nous partons cette fois en orient avec le musclé 'Circo Inferno' que n'auraient pas renié les Israéliens d'Orphaned Land' avec lesquels 'Steve Hackett' avait collaboré sur le magnifique titre 'Chains Fall to Gravity', tiré de l'album 'Unsung Prophets and Dead Messiahs' de 2018, cette composition montrant, n'en déplaisent à certains qui voudraient ranger tous les artistes dans certaines cases, que la musique gagne ses lettres de noblesse lorsqu'elle devient universelle, 'Steve Hackett' étant désormais un très bel ambassadeur de cette musique du monde (sa collaboration avec les Hongrois de 'Djabe' en étant encore un bel exemple). Les deux titres suivants 'Breakout', 'All at Sea', ne dépassant pas les deux minutes chacun, sont des intermèdes instrumentaux, pour le premier, énergique sous la frappe musclée de 'Hugo Degenhardt' à la batterie, 'Steve Hackett' nous montrant également que dans ce style assez proches de celui de formations de métal progressif comme 'Dream Theater' ou 'Threshold', il a également du talent pour des solos bien musclés, et le deuxième qui débute avec des sonorités de guitare à la 'Eddie Van Halen' (ça me rappelle également l'introduction de 'The Obliterati' de son dernier album 'Surrender Of Silence') et qui poursuit ensuite dans de l'atmosphérique nous faisant remonter aux pérégrinations électroniques de 'A Saucerful Of Secrets' du début des 'Pink Floyd'.
On se retrouve ensuite dans le noir à l'intérieur de la baleine avec 'Into the Nightwhale' qui nous offre des claviers aux sonorités effrayantes et qui prend petit à petit de l'ampleur avec une montée chromatique inquiétante débouchant sur un final apaisé avec une section chantée qui me fait penser au titre 'The Great Gates of Kiev' de l'adaptation de 'Pictures At an Exhibition' de 'Modest Mussorgsky' par 'Emerson, Lake & Palmer' datant de 1971. Suit 'Wherever You Are' (voir la vidéo ici) qui est du rock progressif multi-facettes en débutant sur une mélodie chantée accrocheuse et qui poursuit avec une section instrumentale très fournie faisant se succéder quelques bribes de musique baroque, puis de musique contemporaine puis de musique moderne bien musclée, l'ensemble étant accompagné par la guitare de Steve qui enchaine les changements de style très naturellement. Après toute cette débauche d'énergie, 'White Dove' vient clôturer ce magnifique album dans la sérénité pour nous renvoyer, une fois de plus, au bord de la méditerranée (qui rappellera pour certains l'Italie et peut-être pour d'autres la Grèce) avec une mandoline qui nous berce sur une très belle mélodie mélancolique.
En conclusion, comme vous avez pu le constater dans cette chronique, je vous ai cité de nombreuse influences très variées mais qui, pour moi, font de cet album un condensé exceptionnel de progressif au sens large car chaque composition nous embarque dans un voyage différent du précédent. Certes, certains seront peut-être décontenancés par autant de diversité et préfèreront des albums comme 'Wolfflight' plus centré sur du rock progressif mais, pour moi, cet album montre cette évolution toujours constante chez 'Steve Hackett' pour ratisser de plus en plus large, sentiment que j'avais eu dans les trois derniers albums (le premier de la liste étant 'The Night Siren' sorti en 2017) et qui sont rentré à tout jamais dans ma discothèque idéale de musique en général... | |